Le
genre est un ensemble de noms réunis autour d’une propriété commune. Celle-ci
est représentée par un affixe, mais il n’est pas indispensable qu’un nom
affiche cet affixe. L’évolution de la langue peut amener un nom à figurer dans
un genre dont il ne possède pas la propriété.
Le
tem a cinq genres : quatre genres fondés sur des propriétés à caractère
qualitatif (le genre humain, le genre dérivé, le genre menu, le genre neutre)
et un genre fondé sur une propriété à caractère quantitatif (le genre dense).
1. Le genre humain
Le genre humain regroupe plusieurs catégories de noms
d’humains.
Catégorie biologique :
ʋrʋ ‘personne’, alʋ ‘femme, femelle’, abaalʋ ‘homme, mâle’, bu ‘enfant’.
Catégorie sociale :
faɖʋ
‘cultivateur’, lʋʋrʋ ‘tisserand’, wuroɁ ‘roi’, njɛm ‘aveugle’, ʋgɔm
‘étranger’.
Catégorie de la parenté :
caaa ‘père’, kɔɔɔ ‘mère’, kaaa ‘sœur aînée’, newuu
‘cadet(te)’, ɖaalʋʋ ‘frère aîné’, biyaalʋʋ ‘fils’, wɛɛlʋʋ ‘fille’.
Catégorie des patronymes :
AbuɁ, ‘Abou, nom
masculin’, SalaamaɁ ‘Salama, nom
féminin’, Wuro KʋraɁ ‘Ouro-Koura ‘nom d’adulte masculin’.
Le genre humain
renferme beaucoup de noms d’animaux.
Reptiles :
taalʋ ‘ver de
terre’, ɖom ‘serpent’, ɖʋʋ ‘python’, ɖaalʋ ‘serpent, espèce de, désormais sp.’, ɩyɩwʋ ‘crocodile, sp.’
Mammifères :
yuu ‘rat’, sɔɔ ‘chacal’, kpawʋ ‘antilope, sp.’, nyawʋ
‘guib harnaché’, tuu ‘éléphant’, fee ‘ovin’, nam ‘caprin’.
Volatiles :
suu ‘pintade’, ilim ‘faucon’.
Insectes :
tʋʋ ‘abeille’, izim ‘criquet pèlerin’, adɩrɩngbowu ‘guêpe’, agbokpowu ‘hanneton, sp.’, tiiwu ‘fourmi noire’.
Le genre humain
renferme même des êtres inanimés :
tem ‘arbre iroko’,
urooduu ‘mois lunaire’, ʋjɔɔ ‘aiguille à coudre’.
2. Le genre dérivé
La langue tem distingue les êtres
dont l’existence dépend de celle d’autres êtres et les érige en genre. La
dérivation sémantique s’accompagne souvent de la dérivation
morphologique ; aussi le nom de l’être dérivé dérive-t-il souvent de celui
de l’être originel.
Dérivé à partir d’un être
physique :
kpɩzɩɖɛ ‘fruit de kpɩzʋʋ
(acajoutier, sp.)’, loore ‘fruit de loowu (liane fruitière, sp.)’, tɛɖɛ ‘palme de tarʋʋ (palmier raphia)’, wele
‘fruit de weluu (arbre, sp.)’, bʋʋrɛ ‘caillou, morceau de bʋʋ (montagne)’, tɔnɖɛ ‘peau, issue de tɔnʋʋ
(corps)’.
Dérivé à partir d’une
action :
mʋɖɛ ‘abcès’ dérivé de mʋrʋʋ
‘enfler’ ; fɛɖɛ ‘daba’ dérivé de
farɩɩ ‘cultiver’ ; baarɛ ‘danse’ dérivé de baa ‘danser’ ; yɛlɛ ‘œuf’ dérivé de yaa
‘éclater’ ; yɩɖɛ ‘nom’ dérivé de
yaa ‘appeler’.
Dérivé sans origine sémantique
connue :
sele ‘masse métallique du forgeron’, ɖʋnɖɛ ‘genou’, kpɩnɖɛ
‘objet’, tiire ‘termite’, luure ‘lit en terre’.
3. Le genre menu
Etre menu ici, c’est être plus
petit que la norme. Pourtant les noms ordinaires présents dans le genre menu
désignent des êtres qui n’ont rien de spécialement menu :
yika ‘calebasse’, yɩka
‘corne’, liiya ‘francolin (perdrix)’,
fɔɔ ‘chien’, fɔɔ ‘champ’, baŋa ‘cou’, loŋa ‘tambour d’aisselle’.
La propriété « menu »
du genre n’apparaît que dans deux procédés : un procédé de dérivation et
un procédé de qualification.
Le procédé de dérivation
substitue à l’affixe ordinaire du nom celui du genre menu pour obtenir un nom
désignant le même objet mais menu :
kpelɔɔ ‘petit tabouret’, dérivé de kpele ‘tabouret’ ; fɔɖɔɔ
‘petite plante rampante’ dérivé de fɔɖʋʋ
‘plante rampante’.
Le procédé de qualification
utilise le radical qualifiant i qui
exprime l’extrême petitesse. En tant que qualifiant le radical i peut s’associer directement au radical
du nom qualifié (Rad-i-Affixe) soit se présenter autonome (Rad-Affixe #
i-Affixe). Dans les deux cas, comme c’est la règle en la matière, l’affixe qui
suit i doit être celui du nom
qualifié. Or, avec le qualifiant i,
c’est l’affixe du genre menu (ka) qui
s’impose. Soit le nom abaalʋ ‘homme,
mâle’ dont le radical est abaal et
l’affixe ʋ. Dans la formule compacte
de qualification on a /abaal-i-ka/ qui se réalise abaaliya ‘petit brave homme’ (applicable à un général d’armée de
petite taille, par exemple). Dans la formule autonome de qualification on a
/abaalʋ i-ka/ réalisé abaalʋ yɔɔ ‘bout d’homme’.
4. Le genre neutre
Dans une langue à deux genres, il
n’y qu’une des deux propriétés qui a fait l’objet de choix. La seconde
propriété est une propriété par défaut, elle représente ce qui n’est pas la
première. Quand la langue a plus de deux genres, il y en a un qui récolte les
noms rejetés par les autres propriétés qui, elles, ont fait l’objet de choix.
Il est le genre neutre.
En tem, les noms rejetés par
trois propriétés de qualité tombent dans le panier du genre qui est ni-humain,
ni-dérivé, ni-menu, c’est-à-dire neutre, du point de vue de la qualité. Ces
noms représentent :
des êtres géants,
naturellement :
bʋʋ ‘montagne’, taawʋ
‘grand arbre, sp.’, baawʋ ‘palmier à
huile’, laawʋ ‘forêt’, teluu ‘baobab’, komuu ‘fromager’, tɩɩwʋ
‘arbre’.
des normaux :
bɔɔwʋ ‘trou’, ɖaŋ ‘case’,
faawʋ ‘feuille’, foowu ‘nœud’, lowu
‘gorge’, kʋjʋʋ ‘tête’.
des ethnonymes :
TemɁ ‘Tem’, KotokolíɁ
‘Kotokoli’, KabʋrɛɁ ‘Kabiyè’, AŋʋnaɁ ‘Ewé, Mina’, CamanaaɁ ‘Tchamba’.
des toponymes :
NɔɔɁ ‘la rivière Na’, NyalaɁ
‘le fleuve Mono’, KɩgbaafʋlʋɁ ‘la
ville de Bafilo’, KadambaraɁ
‘Katambara’.
Quand il le peut, le nom
d’emprunt s’intègre à un genre dont la propriété a fait l’objet de choix. Cela
peut être grâce à l’euphonie, c’est le cas de lɔɔrɛ intégré au genre dérivé emprunté à l’anglais lorry. Cela peut dépendre de la présence
dans l’emprunt de l’une des propriétés choisie ; c’est le cas de tɩɩlaɁ ‘tailleur’ emprunté à l’anglais tailor intégré au genre humain, et de
bien d’autres emprunts désignant des métiers. En l’absence de ces deux moyens
d’intégration, l’emprunt est systématiquement renvoyé au genre neutre.
La propriété « menu »
exclut les êtres normaux en taille, à plus forte raison les géants. L’accueil
de tous les êtres géants donne l’impression que le gigantisme a fait l’objet de
choix pour le présent genre. Du coup il existe une dérivation augmentative qui
tend à le confirmer : de kpele
‘siège’ dérive kpeluu du présent
genre pour traduire ‘un grand siège’, de wule
‘nombril’ dérive wuluu du présent
genre pour nommer ‘un gros nombril’. Mais en réalité on a affaire à un genre
neutre.
5. Le genre dense
Le dense est ce qui est quantifiable mais non comptable. Le
riz, le mil, en grains, sont des êtres quantifiables à l’aide des instruments
de mesure parce qu’il est impossible de les compter individuellement. Le dense c’est,
en quelque sorte, le pluriel exagéré, un sur-pluriel. C’est donc une propriété
de quantité à ne pas placer sur le même plan que les propriétés de qualité.
L’examen de ce genre sera donc fait dans l’étude de la pluralisation dans les
genres à propriétés qualitatives.
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